En plein débat autour des questions liées à la mémoire et la colonisation de l’Algérie par la France, la revue Expressions Maghrébines se penchera dans son prochain numéro à paraître en novembre 2022 sur les archives au Maghreb.
Si les labellisations de “littérature maghrébine” et de “cinéma maghrébin” renvoient à des champs d’études bien connus, enseignés à l’université, lit-on dans l’argumentaire de l’appel à articles pour ce numéro, celle d’archives maghrébines ne l’est pas. En Algérie, en Tunisie ou au Maroc, cela suscite plus que jamais débats, réflexions et actions entreprises de part et d’autre de la Méditerranée.
En témoignent le rapport Stora sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie côté français, et celui en cours de réalisation par Abdelmadjid Chikhi directeur général des Archives nationales, côté algérien.
La revendication maghrébine de ses archives se concrétise au Maghreb, poursuivent les auteurs de l’argumentaire sous l’impulsion des Maghrébins eux-mêmes.
“Elles se recueillent dans certains lieux depuis quelques décennies : archives des écrivains entre l’Institut Mémoires de l’édition contemporaine (IMEC) avec les Kateb Yacine, Leïla Sebbar, Tahar Ben Jelloun, la BNF (Mohammed Dib), la Cité du Livre d’Aix-en-Provence (Albert Camus), la Bibliothèque nationale d’Alger, de Tunis et du Royaume du Maroc, et s’expriment en plusieurs langues : l’arabe, l’amazigh, le judéo-arabe, le français mais aussi l’anglais, l’italien, l’espagnol, le néerlandais, l’hébreu, etc.”
Aire géographique qui répond à des marqueurs historiques spécifiques, “le Maghreb a son cinéma et sa littérature mais a-t-il ses archives et où les trouver ?”.
Pour répondre à cette question, les articles publiés dans le prochain numéro d’Expressions Maghrébines seront “l’occasion de mieux définir les enjeux des archives et de l’archivage du Maghreb polysémique, séculaire et multilingue, du XIXe au XXIe siècle, en contextualisant l’histoire de la constitution de ses archives en cultures écrites et visuelles, en tentant de distinguer leurs spécificités par rapport aux autres archives aussi bien nationales que panarabes, berbères, juives ou européennes”.
Enfin, il sera important de souligner “les défis auxquels la question des archives du Maghreb est aujourd’hui confrontée dans le sens de la constitution universitaire d’un corpus maghrébin qui œuvre de facto pour la maghrébinisation des archives”.
Ainsi, deux axes de recherche se dégageront : celui des lieux d’archivage matériels et celui des lieux immatériels, des lieux physiques abritant les archives du Maghreb aux “archives archivantes” de la littérature et des arts visuels sans négliger les promesses de la digitalisation des archives.
Les articles traiteront par ailleurs, entre autres, de l’archive-fiction, en littérature, cinéma, bandes dessinées, à l’image d’œuvres telles que L’Art de perdre d’Alice Zeniter, Le Pays des autres de Leïla Slimani ou encore Fi rassi rond-point, de Hassen Ferhani.
Les autres axes abordés auront trait à la question de la “Politique des archives, entre histoire et mémoire”, de leur diffusion, comme la collection “Méditerranée” des éditions du Seuil, les salons du livre ou encore les revues, et enfin de leur statut (archives interdites, détruites, censurées, archives en exil, archives dispersées comme celles du fonds Jacques Berque entre Belfort et Frenda, le fonds Germaine Tillion).
Yasmine AZZOUZ
