Sans la présence d’une auxiliaire de vie scolaire (AVS) pour les encourager et les assister dans l’apprentissage, ces autistes, du moins ceux qui sont acceptés dans des classes ordinaires, ne peuvent pas suivre leur cursus.
Les enfants autistes de la région d’Akbou sont en butte à une kyrielle de difficultés et de carences en tous genres, qui rendent aléatoire leur inclusion sociale : prise en charge défectueuse, absence de structures d’accueil spécialisées, stigmatisation sociale… L’association Espérance, engagée depuis 2016 dans l’éducation thérapeutique de cette catégorie d’enfants, en leur offrant un environnement sécurisé, structuré et favorable à leur épanouissement, se bat avec les moyens du bord, souvent dérisoires, pour atteindre son noble objectif : l’inclusion sociale.
“Nous faisons face à d’énormes difficultés pour assurer correctement notre mission. La masse salariale de notre personnel encadreur est prise en charge par les propres moyens de l’association, lesquels moyens sont principalement issus de la contribution des donateurs et accessoirement des subventions publiques. Par manque de recette régulière et suffisante, nos douze employés, dont deux psychologues et huit éducatrices spécialisées, ne sont pas rétribués à temps et à la mesure de leurs efforts. Ils cumulent toujours des arriérés de salaires non payés, ce qui contraint certains travailleurs à quitter l’association”, explique Mme Madiha Benali, la présidente de l’association Espérance. “Nous avons aussi une charge locative exorbitante à supporter.
Le propriétaire de l’appartement qui fait office de siège de l’association exige des versements anticipés d’une année de loyer. Heureusement que des donateurs nous viennent à la rescousse, mais ces contributions ne sont pas toujours régulières, surtout en ces temps de crise qui touche tous les investisseurs”, ajoute notre interlocutrice.
La présidente de l’association tient, par ailleurs, à dénoncer le mode de répartition de la subvention communale. “Il y a un manque d’équité flagrant. Notre association ne reçoit qu’un quart de ce qui est alloué à certaines associations, qui n’ont pourtant pas de lourdes charges locatives, ni de grosses dépenses, comparativement aux nôtres, dont la subvention ne couvre même pas la moitié de la masse salariale de notre personnel”, regrette Mme Benali, soulignant que “le plus désolant dans tout cela, c’est la lourdeur bureaucratique à laquelle on est confronté et le parcours d’obstacle qui nous est imposé, en nous obligeant à fournir une pile de documents qui ne sont pas exigés par la réglementation en vigueur”.
Sans la présence d’une auxiliaire de vie scolaire (AVS) pour les encourager et les assister dans l’apprentissage, ces autistes, du moins ceux qui sont acceptés dans des classes ordinaires, ne peuvent pas suivre leur cursus, en raison des contraintes liées aux troubles de la communication, à la perturbation des relations sociales et aux troubles du comportement qui les handicapent. Or, “les AVS sont indispensables pour l’autonomie des autistes, mais leur nombre est très limité.
La rémunération qui leur est versée dans le cadre du filet social ne les encourage guère à exercer cette activité laborieuse et contraignante, et beaucoup de ces assistantes finissent immanquablement par abandonner. Pour les retenir, certains parents mettent la main à la poche pour leur assurer un complément d’argent, mais beaucoup d’autres n’en ont pas les moyens”, nous apprend la présidente de ladite association. Le parent d’un enfant autiste résidant au quartier Sidi-Ali, sur les hauteurs de la ville d’Akbou, signale que certains directeurs d’école n’acceptent pas de recevoir des AVS dans l’enceinte de leur établissement. “J’ai mené un combat de titan pour avoir gain de cause mais, à ma grande surprise, quand le directeur a fini par céder, l’assistante de mon enfant a démissionné deux mois après, affirmant être mal payée”, confie-t-il.
La présidente de l’association Espérance se dit, pour sa part, déterminée à œuvrer inlassablement pour repousser les limites du handicap des autistes, pour peu, insiste-t-elle, que les énergies soient fédérées afin de faire bouger les lignes et forcer le destin. “Notre association fait des miracles pour offrir un cadre adéquat, propice à la stimulation sociale et sensorielle pour nos quarante autistes pensionnaires. Nous appliquons des programmes d’éducation en fonction du profil de chaque enfant, en collaboration avec l’association française Relais Île-de-France.” Et d’ajouter, fière : “Nous animons des ateliers variés au profit des autistes, comme l’artisanat artistique, le dessin, la peinture, la couture et bien d’autres. Aujourd’hui, nous sommes fiers d’annoncer que trois enfants parmi nos pensionnaires ont réussi à l’examen de 5e et poursuivent leur scolarité au CEM.
Nous avons engagé des démarches pour réaliser un centre psychopédagogique, pour lequel nous avons eu un accord de principe”, mais “nous comptons sur le soutien des autorités et la contribution de toutes les bonnes volontés pour relever le défi de l’intégration sociale de ces autistes”, ajoute la présidente de l’association Espérance. Installée au cœur de l’agglomération urbaine d’Akbou, une psychologue privée soutient qu’en dehors des cas graves les troubles de l’autisme sont loin d’être une fatalité. “Chez beaucoup d’enfants autistes, les symptômes s’améliorent avec le traitement et l’âge. Les thérapies et les interventions comportementales peuvent cibler des symptômes spécifiques et apporter des améliorations considérables. En grandissant, certains autistes finissent par mener une vie normale”, assure-t-elle.
SYPHAX M.