Culture Il expose ses produits à l’Atelier

Alélé, un artisan targui à Paris

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Ali BEDRICI Publié 22 Novembre 2021 à 18:44

© D. R.
© D. R.

Au gré de pérégrinations dans le 5e arrondissement de Paris, le promeneur découvre l’Atelier, situé rue Lacepède, non loin du Panthéon. C’est là qu’une artiste s’adonne à son art favori, la sculpture. Le week-end dernier, elle a mis l’Atelier à la disposition d’Alélé, arrivé du lointain Niger pour proposer des produits d’artisanat venus d’Agadez, sa ville natale. L’exposition contient des articles en métal, en cuir, mais essentiellement des bijoux en argent qu’une clientèle intéressée scrute, soupèse et essaye avant de se décider. Alélé, le port altier comme seuls les Touareg peuvent avoir, prend le temps de discuter avec les visiteurs charmés par sa tenue traditionnelle. C’est avec la même amabilité qu’il accorde cet entretien à Liberté.

Liberté : D’où vient cet artisanat ?
Alélé : Il est produit au Niger, par des Touareg d’Agadez qui sont organisés en coopérative dont je suis le fondateur et le directeur depuis 35 ans. À ce titre, j’ai beaucoup voyagé un peu partout en Afrique de l’Ouest, en Algérie et en Europe. Cet art est hérité de père en fils car il n’existe pas d’école d’apprentissage. L’utilisation des métaux, particulièrement, ne relève pas de n’importe qui. Cela revient à une caste de la société targuie : les Inadene. Ce sont eux qui fabriquaient jadis les épées et autres armes. Aujourd’hui, ils poursuivent la tradition dans le travail de l’argent et autres métaux pour la fabrication d’objets artisanaux d’apparat. 

Peut-on parler d’une évolution qualitative de l’artisanat targui ?
On me dit souvent que les bijoux ne sont plus comme ceux d’avant, faits de métal un peu massif et sans esthétique. Oui, parce que les clients ne sont pas les mêmes, chaque époque possède ses clients, donc il s’est produit dans le temps une adaptation à la clientèle. 
Avant, les gens de chez nous achetaient sans se déplacer, c’était une consommation locale, des Touareg qui consommaient des bijoux touareg. Même si on a gardé l’âme du bijou targui dans le style,  on a adapté le même travail, les mêmes gravures à différentes clientèles qui sont africaines, européennes  ou d’ailleurs. Si le mot moderne ne convient pas, je dirais que nous avons aujourd’hui un artisanat différent, adapté à son époque.

On constate plus de finesse dans l’artisanat d’aujourd’hui...
À Agadez, depuis toujours, l’artisanat est d’une finesse qu’on ne trouve nulle part ailleurs. C’est vraiment une spécialité d’Agadez qui concerne le travail du cuir, du bois, de la pierre et des métaux. Les produits d’artisanat, comme les bijoux, sont ciselés finement, avec une esthétique recherchée. Cet artisanat évolue car il y des critiques et des professionnels. 
Dans l’Aïr, Agadez a toujours été le centre de l’artisanat, tous les Touareg venaient apprendre à Agadez, et l’artisanat qu’on trouve dans le monde touareg vient souvent de là. On travaille beaucoup le cuir, les métaux  et le métal noble, l’argent, que l’on préfère à l’or.

Avez-vous des échanges avec d’autres pays ?
Nous les Touareg, on est chez nous à Agadez, à Tamanrasset et dans d’autres villes. On a de la famille et des amis dans différents pays. Dans notre tête, les frontières sont théoriques. J’ai fait des foires, comme l’Assihar de Tamanrasset où l’on a tenu des ateliers d’artisanat, on a assuré des formations à des gens sur place ou à ceux d’Agadez qui sont à Djanet ou à Tamanrasset. Mes cousins et des collègues de notre coopérative artisanale ont exposé à la Foire internationale d’Alger où nous avons souvent un stand. On participe aussi au Salon international de l’artisanat du Burkina Faso, à Dakar au Sénégal ainsi qu’à quelques foires où sont exposés des produits de l’artisanat targui.

L’artisanat est-il une activité rentable ?
Oui, car Il y a partout une demande d’artisanat ethnique et culturel.
C’est pour cela qu’on doit s’adapter aux différentes clientèles et ne pas hésiter à participer aux foires et à voyager pour faire connaître nos produits. Là, par exemple, je me trouve en France où je profite de l’hospitalité de quelques amis qui m’invitent à exposer et vendre mes produits, essentiellement des bijoux d’argent dont l’esthétique suscite l’intérêt des visiteurs.
 

Propos recueillis par :  Ali BEDRICI

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