Ce sont plus d’un millier de travailleurs en blouses blanches qui ont pris part à un rassemblement organisé dans la matinée devant l’administration du CHU pour tirer, une fois de plus, l’alarme quant à leur situation socioprofessionnelle. Le rassemblement, de par le nombre de participants, laissait, d’emblée, deviner que la grève était massivement suivie. Rencontré sur place, le président du bureau de wilaya du syndicat SAP, M. Gounane, nous a affirmé que le taux de suivi de la grève était de 98%. “La grève est suivie à 98%. Tous les blocs sont fermés, seul le service minimum est assuré”, nous a-t-il affirmé précisant que “cela dénote l’ampleur du ras-le-bol des travailleurs du secteur”.
Concernant les revendications des travailleurs de la santé, notre interlocuteur nous explique qu’elles sont liées au statut et aux promesses, non tenues par le Président. “Ils ont institué une prime présidentielle par décret et depuis le mois de septembre nous ne l’avons pas reçue. La 3e et la 4e devaient être versées depuis neuf mois et nous ne l’avons pas encore touchée et voilà qu’à peine notre grève annoncée, un télex est envoyé pour annoncer la libération de la 3e”, a-t-il soutenu. “Il y a eu des promesses du Président, mais où sont-elles ! Ni celle des deux mois de travail sous le Covid qui devait donner lieu à une année de retraite, ni celle de l’assurance à 100%, ni celle de la sortie de la santé de la fonction publique pour bénéficier d’un statut spécial ne sont appliquées. Ce ne sont que des paroles en l’air, que du vent et aujourd’hui y en a marre”, a-t-il dénoncé rappelant que le personnel de la santé a affronté la situation en soldats et certains ont laissé leur vie dans l’arène du combat contre le virus, mais que leurs enfants n’ont aucune prime spécifique.
“Qui va les faire vivre aujourd’hui ! Nous avons accompli notre devoir mais ils n’ont pas honoré leurs promesses”, a-t-il déploré.
À Constantine, des centaines de praticiens de la santé publique issus des différents établissements et structures de santé de la wilaya se sont regroupés dès 10h dans l’enceinte de l’hôpital pour entamer une marche au sein même du CHU. Brandissant des pancartes portant les revendications qui ont conduit les trois syndicats à recourir au débrayage pour une journée et scandant des slogans hostiles à la tutelle qu’ils accusent d’immobilisme et de non-respect des engagements qu’elle a cosignés avec les partenaires sociaux.
Ils ont parcouru pendant plusieurs minutes le chemin reliant différents services du CHU.
“Nous voulons la dignité et non pas la charité”, scandaient-ils entre autres mots d’ordre. “Par cette journée de protestation, nous voulons interpeller le premier magistrat du pays sur la non-concrétisation des promesses qu’il a lui-même décrétées”, dira Khaled Remache, le chargé de communication au bureau de wilaya du Syndicat algérien des paramédicaux (SAP) partie prenante de ce mouvement. D’autres structures publiques de santé de la wilaya de Constantine ont également connu des mouvements de protestation similaires durant cette matinée.
C’est le cas de l’hôpital Mohamed-Boudiaf d’El-Khroub et des EPSP d’Aïn Abid et de Zighoud-Youcef. Alors qu’il est difficile de quantifier le taux de suivi de la grève, en l’absence des chiffres de la DSP, un membre du Snechu avance le chiffre de 95% de taux de suivi dans les différentes structures hospitalières que compte la wilaya d’Oran. Une grève qui coïncide avec la visite du ministre de la Santé, venu inaugurer la 23e édition du Salon international du mobilier hospitalier et de l’équipement médical et inspecter l’hôpital des grands brûlés et de Chteïbo. Cependant, et de l’avis général, la rupture de l’activité médicale ne s’est pas fait sentir particulièrement au CHU d’Oran où hormis un sit-in de protestation qui a regroupé une trentaine de personnes devant le siège de la direction générale, on n’ a enregistré aucune activité d’ordre syndical. “Puisque la journée de protestation avait été décidée en amont et que les gens étaient avisés, la grève a été organisée dans certains établissements de santé”, indique notre source d’information qui précise qu’elle a concerné les hôpitaux d’Oran, d’Aïn El-Turck et d’El-Mohgoun ainsi que les EPSP. Tout le monde était d’accord parce que ce débrayage concerne les conditions de travail du personnel soignant. Les urgences nt été assurées.
À l’inverse de certaines wilayas, la grève de l’intersyndicale du personnel de la santé était mitigée à Sétif. En effet, les services du CHU ainsi que les différentes unités de la ville dont celles mère-enfant Harchi-Messaouda d’El-Bez , ORL et ophtalmologie Tair-Delloula du centre-ville et le pôle pédiatrique Derradji-Bouatoura de Kaaboub ont enregistré un taux de suivi qui n’a pas dépassé les 10%.
À l’EPH d’Aïn El-Kébira, le mot d’ordre a été suivi à hauteur de 60% des travailleurs. L’établissement a enregistré une grève de plus de 120 travailleurs. Le service minimum a été assuré au niveau des services de la structure. Pour les urgences médicales et chirurgicales, les citoyens qui s’y sont rendus dans la matinée n’ont pas remarqué qu’il y avait grève. En revanche, au niveau des établissements publics de santé de proximité (EPSP) , le débrayage a été plus important. Selon des sources concordantes l’EPSP du chef-lieu de la wilaya a été quasiment paralysé. Seuls les services dédiés à la Covid-19 fonctionnaient. Le centre Bentoumi-Saïd a été paralysé à près de 100% a indiqué une source à Liberté.
À la sortie du centre de la cité des 1006-Logements, une jeune fille nous a indiqué que des médecins ont refusé de lui délivrer un certificat médical qu’elle devait présenter à son employeur. À Jijel, la grève n’a pas eu d’impact sur le secteur. S’il n’y a pas d’établissements hospitalo-universitaires à Jijel, il n’en reste pas moins que dans les EPH et les EPSP, le travail n’a pas été perturbé par cet appel à la grève pour cause d’absence de représentation syndicale. À Béjaïa également, l’appel à la grève n’a pas drainé beaucoup de protestataires. Elle a été faiblement suivie. Si au niveau du CHU Khelil-Amrane, la grève a été, selon le Pr Djilali Aïssa, SG de la section syndicale Snechu de Béjaïa, massivement suivie, ce n’était pas le cas dans d’autres établissements hospitaliers, à l’instar des hôpitaux de Sidi-Aïch et de Kherrata, où l’adhésion au mot d’ordre de grève a été très faible, voire insignifiante.
S. L./S. O./K. G./F. S./A. Z./L. O.