“En 2022, il n’y aura que de l’économie, et là, on verra qui marche avec nous et qui met les bâtons dans les roues.” À bientôt deux ans depuis son arrivée aux affaires à la tête du pays, Abdelmadjid Tebboune fait état de nouveau de l’existence de “blocages” qui, selon lui, entravent la relance de l’économie. Des blocages qualifiés d’“inacceptables” et de “crimes contre l’économie nationale”. Comme souvent et tout comme d’autres responsables à plusieurs échelons et dans divers secteurs confits à la culture du système, Abdelmadjid Tebboune ne se montre pas très disert. Il ne fournit, en effet, ni l’identité des auteurs de ces blocages ni les sphères exactes dans lesquelles ils opèrent. On apprendra seulement que les entraves sont d’ordre bureaucratique, une tare au demeurant structurelle, lorsqu’elles ne sont pas liées à des faits de corruption. Et comme souvent, il croit déceler derrière ces blocages des “arrières pensées politiciennes”. Mais ce n’est pas la première fois que Tebboune fait état d’actes de sabotage, aux contours de complot, qui entravent son action.
En août 2020, Abdelaziz Djerrad avait été instruit par la Présidence pour ouvrir une enquête sur la crise des liquidités, les incendies de forêt et la pénurie d’eau survenus à la veille de l’Aïd el-Adha. On ignore à ce jour ce qu’il est advenu de cette enquête. Quelques jours plus tard, le même Abdelaziz Djerad révèle devant les walis que plus de deux tiers des orientations du chef de l’État n’étaient pas exécutées sur le terrain. Cette remontrance présidentielle, qui intervient, faut-il sans doute le relever, quelques jours après l’annonce d'une “inspection générale”, afin de “contrôler l'activité des responsables”, appelle, cependant, quelques interrogations. S’agit-il pour le Président de se défausser sur des forces occultes pour justifier quelque lenteur dans l’exécution de son programme ? Faut-il y voir la persistance de forces parasitaires aux intérêts claniques et de lobbies attachés au statu quo et réfractaires à toute réforme ?
Ou alors, peut-on dire que l’esprit du Hirak a déteint sur certains segments de l’administration frileux à toute coopération ? Qu’elles soient surjouées, avérées ou présumées, ces entraves traduisent, au demeurant et d’une certaine façon, les travers de tout un fonctionnement et d’un mode de gouvernance d’un système obsolète, celui-là même qui est à l’origine de la crise. C’est la paralysie politique qui fait obstacle aux réformes économiques. Sans des réformes institutionnelles profondes, structurelles et démocratiques, sans inclusion d’un large éventail d’acteurs, sans transparence et sans l’association des jeunes, toute entreprise de relance butera fatalement sur des résistances. ■