L’image restera pour la postérité : Djamel Belmadi, en larmes, genoux à terre et inconsolable. À elle seule, l’image illustre la grande désillusion d’un homme, et au-delà de tout un peuple, après le ratage par l’équipe nationale de la dernière marche qui devait la conduire au Mondial du Qatar. En une poignée de minutes, on est passé du rêve, de l’ivresse à la détresse. C’est au moment où on pensait enfin tenir le ticket qualificatif que les Camerounais, profitant d’un moment de déconcentration d’une équipe mentalement fébrile, nous assomment en nous renvoyant à nos primaires désillusions. Un coup de massue après celui de la dernière CAN.
On n’ira donc pas au Qatar, objectif que Djamel Belmadi s’est assigné depuis son arrivée en 2018. Mais s’il ne remet pas en cause tout le travail accompli, cet échec met, toutefois, en lumière certaines réalités qu’on ne peut dissimuler aujourd’hui. À commencer par les limites de l’équipe qu’on a peut-être un peu trop surestimée. Car il faut bien se rendre à l’évidence : les signes d’une régression annoncée étaient apparus lors du match livré contre le Burkina Faso au Maroc où les camarades de Mahrez étaient à ramasser à la petite cuillère. Mais au-delà, c’est essentiellement le travail de sape en sourdine, quand ce ne sont pas des pressions multiformes sur l’équipe pour des desseins aux contours flous qui ont fini, au fil des mois, par déstabiliser l’équipe et lui assigner un rôle qui n'est pas le sien. Sinon, comment expliquer l’épisode du gazon catastrophique du stade de Blida la veille d’un rendez-vous de l’équipe ? Pourquoi des changements en cours de route au sein de la Fédération ? Faut-il rappeler l’annulation d’un match de préparation de la CAN au Qatar ? Et ce n’est pas exhaustif.
Djamel Belmadi, dont les accès de colère sont loin d’être fortuits, a lui-même fini par lâcher lors de la conférence d’après-match : “Un fonctionnement dans cette équipe nationale a été mis en difficulté ces dernières années.” Bien plus qu’un échec footballistique, l’élimination de l’équipe, c’est d’abord une faillite de ceux — à plusieurs échelons de responsabilité — chargés de la protéger, particulièrement du travail hostile de lobbies qui se fait aussi dans certaines instances internationales. Et comme l’illustre l’arbitrage scandaleux dénoncé par Belmadi à plusieurs reprises. Car en définitive, rien ne dit que tout a été fait pour empêcher l’équipe, porte-étendard, d’être au Qatar, un pays au carrefour de nouveaux enjeux géostratégiques.