À deux mois de fêter son 30e anniversaire et à moins d’un mois de la Journée internationale de la liberté de la presse, le journal Liberté va être enterré, par une sentence de son propriétaire qui a décidé sa dissolution. Cette dernière sera actée aujourd’hui par une assemblée générale extraordinaire qui liquidera en cinq minutes trois décennies d’un parcours d’un titre qui a pu se maintenir au sommet du paysage médiatique depuis sa création en 1992.
Liberté est devenu une référence au sein d’un lectorat de plus en plus nombreux, par la pertinence de ses analyses, de son ton qui ne permet aucune compromission, ses chroniqueurs avec leur espace de liberté que n’approche ni la censure ni l’auto-censure. Son Dilem incontournable qui n’a jamais abandonné sa lucarne depuis 20 ans. Il se plaît à croquer des personnages et à résumer l’info du jour par un seul trait. Il se dit que Liberté, quotidien en langue française, est le seul dont on commence la lecture par la dernière page. Par… Dilem.
La force de Liberté tient aussi à la fidélité des journalistes à leur titre et à son esprit qu’ils ont rejoint dès sa création et qu’ils n’ont pas quitté. Ils avaient 20 ans, ils sont, aujourd’hui, en préretraite. Tout cela est autant de satisfactions engrangées par chacun de nous, à un moment donné d’un itinéraire professionnel qui se confond avec une aventure intellectuelle et le sentiment mérité de se dire que Liberté a participé activement et sincèrement à la défense des idéaux républicains.
Mais le journal a aussi payé chèrement la défense de cette liberté en payant un lourd tribut avec deux journalistes et de collaborateurs assassinés, six suspensions et des emprisonnements.
Toutes ces pressions vécues et supportées durant toutes ces années ne sont pas venues à bout de la conviction des journalistes à exercer leur métier d’informer. Même le terrorisme n’a pas réussi à abattre un quotidien qui a assumé pleinement son nom. Il a juste suffit d’une décision sans justificatif pour que l’infanticide survienne. Contre toute attente. Loin d’être un fait divers casé dans la rubrique économique, l’acte en lui-même laissera des traces indélébiles pour longtemps. ■