Rencontres, débats, échanges et retrouvailles étaient l’essence de cette 25e édition du salon international du livre d’Alger inscrit sous le signe de “Le livre, passerelle de mémoire”.
Si beaucoup d’éditeurs et d’auteurs “appréhendaient” ce retour après deux ans d’absence, à cause du contexte particulier, entre pandémie et changement de dates-le sila se déroule habituellement entre octobre/novembre, -cet évènement livresque n’a pas dérogé à la règle et a vu neuf jours durant, la participation d’un grand nombre de visiteurs.
A ce propos, le commissaire du Sila, Mohamed Iguerb a annoncé, hier à la Safex, lors de la traditionnelle conférence de presse de clôture, que pour cette édition, le salon a accueilli pas moins d’1,3 million de visiteurs.
Pour le premier responsable du Salon, cette édition, qui s’est tenue du 25 mars au 1er avril, est “exceptionnelle”, de part toutes les nouveautés, à savoir l’espace d’échange de livres et une plateforme virtuelle offrant une visite à “toute personne n’ayant pu venir au Sila”.
D’ailleurs, les différentes rencontres et activités publiées sur Facebook ont touché 3 414 933 internautes. Quant au nombre de vues des vidéos partagées sur les réseaux sociaux, elles ont atteint 857 786.
Cette conférence était également une occasion de rappeler que c’est une édition “riche” par le nombre d’exposants, venus des quatre coins du globe. Ainsi les bibliophiles ont pu découvrir 1250 participants : 266 Algériens, 324 Arabes et 660 étrangers. Concernant la programmation culturelle, M. Iguerb a précisé qu’elle a été marquée par son programme littéraire et culturel ainsi que par la qualité des conférenciers, à l’instar de Dahou Ould Kablia, Amel Bouchareb Jalal Barjass, Boutheina El-Issa, Mohamed Lahbib Salmi, Ricardo Nicolaï ou Mahamet-Saleh Haroun. Sans compter le programme annexe proposé par le HCA, le Crasc, les instituts culturels étrangers…
Par ailleurs, au sujet du pays invité d’honneur, le commissaire du Sila a souligné que l’organisation de la “rencontre professionnelle entre les éditeurs algériens et italiens se soldera, sans conteste, par un partenariat dans ce domaine”.
Le programme culturel, une tribune de liberté
Au premier jour du Sila, vendredi 25 mars, dès 9h, le pavillon central grouillait de monde. Et, chose constatée tout au long de cette semaine, l’intérêt des visiteurs, jeunes et moins jeunes, pour les diverses rencontres (une cinquantaine) concoctées par le Sila, l’Italie, les éditeurs ou autres institutions algériennes et étrangères. Une bouffée d’oxygène pour les amoureux de la culture, qui en ont été privés ces deux dernières années.
Parmi ces rendez-vous livresques, le public a eu droit à des communications et des échanges sur de thématiques portant sur “L’Italie dans l’imaginaire algérien”, “La cause de l’indépendance algérienne en Italie”, “La traduction : réalité ou perspectives”, “Le roman, plaisir d’écriture ou désir éditorial ?”... Les traditionnelles “estrades” ont mis à l’honneur des écrivains tels que Abdelmalek Mortad, Jalal Barjes ou encore la Koweïtienne Bothayna Alessa, qui a fait salle comble.
L’Esprit Panaf, qui donne la visibilité à la littérature africaine, était également une tribune de dialogue entre des écrivains du Mali, du Sénégal, du Tchad et d’Algérie. Sans oublier les fameuses ventes-dédicaces qui permettent ainsi au public de rencontrer ses auteurs préférés, comme Anouar Benmalek, Amin Zaoui, Akli Tadjer, Jamila Rahal, Kamel Daoud, Nadjib Stambouli, Amin Khan et tant d’autres.
éditeurs, écrivains et curieux renouent avec la magie du livre
Outre cette programmation, le Sila est avant tout “the place” pour se procurer des livres, romans, essais, histoires, manuels parascolaires, scientifiques… Et le mythe “les Algériens ne lisent pas” vient d’être déconstruit une nouvelle fois ! Les “acheteurs” étaient là et les férus de lecture ont fait le plein chez les différents exposants, qu’ils soient Algériens, étrangers ou Arabes.
En parcourant les stands, notamment chez Hachette, quotidiennement, une petite file se formaitau niveau des caisses. C’était aussi le cas chez les éditeurs algériens, et ce, malgré la cherté des livres due à la pénurie et à l’augmentation du prix du papier.
Liberté a rencontré trois éditeurs, pour ne pas dire des “habitués” du Sila, qui font le bilan de cette 25e édition pleine de surprises !
Pour Yasmina Belkacem, des éditions Chihab, “au début, nous appréhendions un peu, mais finalement nous avons été agréablement surpris. Malgré la cherté de la vie et la pandémie, les gens étaient au rendez-vous !”
“Les meilleures ventes sont les livres d’histoire. Les mémoires de Bentobbal de Djerbal est en tête de liste. En revanche, le parascolaire ne s’est pas vraiment vendu car c’est la fin de l’année.” A propos des prix affichés, Yasmina Belkacem a expliqué que la cherté du papier se “répercute” automatiquement sur le prix du livre. Et beaucoup de maisons d’édition n’ont pu réaliser de remises. Sauf quelques-unes, allant de 10 à 30%.
Pour sa part, Anissa Amziane, des éditions Casbah, appréhendait” aussi ce retour à cause du changement de dates : “A la veille du Ramadhan, nous pensions qu’il ne pouvait y avoir un engouement pour le salon. Finalement, nous nous sommes trompés ! Et nous avons réalisé de bonnes ventes.” Selon l’éditrice, les livres – roman, essai ou histoire – ont attiré le public.
“Certes, l’engouement n’est pas aussi fort que les années précédentes, mais ils étaient là et nous avons reçu du monde pour les ventes-dédicaces”, précise-t-elle.
De son côté, Sofiane Hadjadj, des éditions Barzakh, se dit “très content de l’initiative de remettre sur les rails le Sila, malgré la situation difficile et nos appréhensions, à savoir une situation économique difficile, l’approche du Ramadhan… Pour ces raisons nous avions quelques craintes, mais nous étions quand même contents de rouvrir”. Et de poursuivre : “C’est une joie de retrouver les lecteurs, et de voir que les gens sont prêts à acheter et de lire algérien. Le succès du Sila tient, car c’est un salon international, donc il y a une diversité de l’offre éditoriale, des livres étrangers, du Monde arabe et de l’espace francophone.” Aussi, le Sila permet à la production nationale de “mettre en valeur” ses livres. Au sujet des ventes, M. Hadjad a indiqué que la meilleure vente est le prix Goncourt 2021, La plus secrète mémoire des hommes, du Sénégalais Sarr, dont ils ont acheté les droits.
L’éditeur a émis le souhait qu’il y ait une autre édition en octobre pour “redynamiser” encore plus la profession. Et de conclure : “C’’est un vrai bol d’air. Renouer avec les lecteurs, c’est se redonner de l’énergie et de l’espoir.”
Hana. M.