Quand, en février passé, un confrère bien informé m’annonça que Liberté allait fermer, je ne l’ai pas cru. Pas une seule seconde. La situation du journal n’était, certes, pas reluisante depuis quelques années, mais enfin, un plan social avait été mis en branle avec l’objectif de rééquilibrer les finances, des employés avaient été forcés de quitter le journal et plusieurs autres mesures devaient été prises pour éviter la disparition d’un journal qui, en trente années de sacrifices et de persévérance, était devenu une des références de la presse indépendante, un monument appartenant au patrimoine algérien. Les responsables du journal avaient jusqu’à juin 2022 pour parvenir à rééquilibrer les finances, quitte à se séparer d’une partie supplémentaire du personnel pour ne fonctionner qu’avec le strict minimum. L’essentiel était que Liberté ne disparaisse jamais du paysage médiatique. Et pourtant, avant même que le plan n’arrive à échéance, l’inimaginable se produisit : le journal allait effectivement fermer et il n’était même pas question qu’il continue de paraître en version électronique ou que le titre soit repris par une société de rédacteurs. Liberté devait complètement disparaître. Et en quelques jours, malgré les interpellations inquiètes des journalistes, des intellectuels et de citoyens, le décès fut acté par une assemblée générale. Désormais, Liberté n’est plus.
Au-delà de la fermeture d’une entreprise qui était source de revenus pour de nombreuses familles en ces temps d’incertitude, c’est la disparition d’un autre journal qui apportait la contradiction, permettait les débats et portait la voix de toutes les catégories de la société qui inquiète. Et ce n’est pas moi qui le dis : demandez aux hirakistes, aux détenus et à leurs familles, aux enseignants, aux retraités, aux médecins, aux harraga, aux chômeurs… Demandez à Yasmina Khadra, à Louisa Hanoune, à Saïd Sadi, à Fatma Ousseddik... Dans les pays où la liberté de la presse est consacrée, où le droit à l’information est respecté, les pouvoirs publics seraient sans doute intervenus pour éviter la mort d’un journal de la stature de Liberté. Une formule aurait été trouvée et le journal aurait poursuivi sa mission d’informer et d’éclairer les citoyens. Mais la réalité algérienne, absurde, amère, les journaux qui ne caressent pas dans le sens du poil laissent place aux médias acquis au pouvoir en place.
Dans quelques années, les Algériens se rendront compte de la gravité de ce qui arrive, aujourd’hui, avec la disparition du journal Liberté, et même ceux qui ont permis que cela se produise regretteront sa mort.
En attendant, je salue le travail effectué par mes collègues et espère que le soleil brillera de nouveau sur la presse algérienne.
L’Actualité
Oran fait ses adieux à “Liberté”
Samir OULD ALI Publié 14 Avril 2022 à 12:00
Mumtimedia Plus
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Editorial Un air de "LIBERTÉ" s’en va
Aujourd’hui, vous avez entre les mains le numéro 9050 de votre quotidien Liberté. C’est, malheureusement, le dernier. Après trente ans, Liberté disparaît du paysage médiatique algérien. Des milliers de foyers en seront privés, ainsi que les institutions dont les responsables avouent commencer la lecture par notre titre pour une simple raison ; c’est qu’il est différent des autres.
Abrous OUTOUDERT Publié 14 Avril 2022 à 12:00
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Chroniques DROIT DE REGARD Trajectoire d’un chroniqueur en… Liberté
Pour cette édition de clôture, il m’a été demandé de revenir sur ma carrière de chroniqueur dans ce quotidien.
Mustapha HAMMOUCHE Publié 14 Avril 2022 à 12:00